Je suis plus un garçon du sud et du soleil, du coup j'avais jamais fait cette expérience. En plus je suis originaire de région parisienne, donc l'endroit où j'ai vu le plus de neige, c'était Strasbourg. En gros de Strasbourg, en termes de neige, je suis passé tout de suite au Groënland, c'était un autre délire.

C'est pas tant le visuel qui prône sur notre expérience, c'est plus vraiment le lien avec l'eau qu'on a établi. On s'est rendus compte bien qu'on en aie énormément, c'est une gestion de fou pour en avoir, pour s'en protéger, pour protéger son matériel. Il faut tout le temps négocier avec l'eau et les conditions climatiques en fait. L'eau elle s'en bat les couilles en fait, elle a sa propre identité, H2O et après elle s'adapte à n'importe quelle forme, elle peut être gazeuse, solide, liquide. C'est ça qui a fait qu'on aie cette démarche par rapport à notre identité, sur le fait que notre identité se mouvoie par rapport aux impacts des autres sur nous, sur notre regard etc. Du coup l'eau s'associait vraiment à ça et depuis cette expérience au Groënland j'associe beaucoup l'eau avec mes projets.

Il y avait un tas de préparation pour sortir. Fallait qu'on se sape, fallait qu'on prépare le matos, ma caméra, mes batteries… On se disait une heure à l'avance, on va sortir, ça se faisait pas en deux secondes. Ça c'est quelque chose qui nous est restés.

Kerguelen, terre des merveilles de la nature.

Mousses et hépatiques, des forêts luxuriantes à ras de terre.

Choux, force d'un symbole et pourtant si fragile.

J'ai un faible pour les bouts du monde inaccessibles, hostiles et sauvages, où l'homme n'a pas totalement réussi à dominer cette Nature. Et je suis particulièrement mûe, depuis plus de dix ans, par une attraction pour les régions polaires. J'ai attrapé le virus de la glace sous toutes ses formes, et depuis c'est une obsession.

Je me souviens de ce vent puissant qui fouettait le visage, le bonheur de marcher et toucher la terre (bonheur partagé). Les gens m'ont frappé ainsi que la petitesse de leur base qui paraissait soudain bien fragile pour y vivre un an. Puis les manchots, et ces fameux "kiwis" poussins, là en revanche j'ai mitraillé et j'ai été émerveillée, comme si c'était la première fois (alors que non j'avais déjà eu la chance d'aller en Péninsule Antarctique pendant 3 mois)! 

Plusieurs moments sont liés à un endroit mystique: la cabane du Laboureur perdue dans le Golfe du Morbihan. J'ai adoré me retrouver isolée en petit groupe avec mes touristes (8 personnes) pendant 2 voir 3 jours quand nous sommes restés coincés une nuit de plus. Les ciels étoilés, la visite d'un manchot macaroni, les tentatives infructueuses de pêche, la neige, le dauphin de Commerson, les moules géantes et foisonnantes… Bref oui beaucoup de beaux souvenirs, des paysages à couper le souffle. 

On a finalement très peu de temps pour soi quand on part en mission là-bas. D'où la naissance de cette frustration de passer trop vite, et le souhait de rester. À ce moment-là je pense que oui le temps peut alors s'étirer. 

J'ai eu la sensation en tant qu'Humain de ne pas être à ma place. D'être une observatrice modeste, prête à capter et écouter les leçons de cette Nature d'une rare beauté sauvage, à la fois généreuse et cruelle, qui donne et reprend à chaque instant. 

Depuis la Réunion, la Marion Dufresnes fait partie du paysage et fait rêver beaucoup de gens. J'ai eu un premier déclic quand une amie a organisé en 2015 un voyage avec 8 collégiens, je l'ai accompagnée dans ce projet, et étais sur le quai le jour du départ. Il a donc fallu 5 ans pour que j'y aille à mon tour, il fallait juste réunir l'argent.

La première impression a été magique, arrivée sur la baie américaine à Crozet au petit matin, le bateau entouré de manchots qui nagent, je ne m'attendais pas à ça… Un moment unique, hors du temps, irréel, puis journée entière sur terre, déposés par hélicoptère, au milieu de paysages extraordinaires et d'animaux en pagaille. Il a fait une journée magnifique, ensoleillée et presque chaude, et j'ai eu du mal à imaginer que j'y étais.

Je garderai longtemps en tête le bruit de la manchotière, cacophonie agréable des petits cherchant leurs parents, et le souvenir visuel des petits avec leur fourrure de bébés tellement attendrissants. Et aussi du coup de soleil pris ce jour là car personne ne se doutait qu'il ferait si beau.

Le temps semblait à la fois s'être arrêté, et passer relativement vite, l'alternance entre les moments en mer, sur terre, les nombreux documentaires à bord du bateau et les activités diverses, pas le temps de s'ennuyer… La sensation que je garderai est celle d'harmonie totale avec la nature, pour une fois l'homme n'est plus au dessus, c'est la nature qui gouverne.

Si j'en avais la possibilité, j'avoue que je tenterais bien l'expérience d'y rester quelques mois, pour pouvoir expérimenter vraiment une vie coupée du monde… À l'heure ou le monde entier est confiné chez soi, je donnerais cher pour être la bas, je regarde souvent les videos des animaux, les photos de ce sejour et ces grands espaces sauvages ou l'animal est à sa place m'aide à m'évader un peu des quatre murs de la chambre d'hotel ou je suis en quarantaine. J'ai maintenant envie d 'explorer davantage les régions polaires et les endroits reculés, ou la nature règne.